Bouvier (Nicolas), Correspondance des routes croisées, Zoé, Genève, 2010 p. 987 :
"C’est l’informe qui nous tue, le Diable, c’est l’informe, c’est l’anti-créateur, le génie de la dissolution. ; tout ce qui est formulé le fait reculer de quelques pas. Et - me semble-t-il - ce n’est pas par hasard que de tous temps on lui a opposé des formules. N’importe quelle œuvre a je crois une valeur double ; valeur de cantique ; valeur d’exorcisme. Les créateurs bien plantés en terre et bien encadrés dans un paysage historique et social [...] sont en mesure de faire porter tout l’accent sur le côté cantique. Tant mieux. Les autres qui rôdent souvent seuls sur des frontières moins plaisantes et qu’ils n’ont pas toujours choisies sont obligés d’exorciser beaucoup. Leurs œuvres sont moins sereines, quelquefois contiennent encore un peu de l’angoisse qu’ils combattent quotidiennement et qu’ils n’ont pas pu résorber. Mais ils ne sont pas moins utiles ; quelquefois ils crèvent sur la frontière où ils s’étaient risqués."