Fante (Dan), Rien dans les poches [Chump Change], chap 3, trad. Mercadet :
"J’ai entendu un grondement lointain et le clair de lune a éclairé une torpille blanche et poilue, un chien qui déboulait du coin. Un solide bull-terrier de quatorze ans, Rocco. Le bonheur et la gloire de mon père. Ce que Jake La Motta avait été chez les poids moyens, Rocco l’était chez les chiens. Il approchait. Je vis sa patte boiteuse et les vieilles cicatrices aux bords déchiquetés qui lui couvraient la gueule, rivières de douleur à sec au terme de cent combats.
Le crâne arborait les traces de la croissance démographique du quartier familial. Comme des cercles dans l’épaisseur d’un arbre, chaque cicatrice marquait une arrivée, un doberman, un rottweiller, un berger allemand ou un danois. Rocco se battait contre tous les autres chiens, pendant que leurs maîtres construisaient des maisons et commettaient l’erreur de les laisser franchir le périmètre de la propriété paternelle. Tous ces combats étaient gravés sur la gueule de Rocco."
In the distance I heard growling and the moonlight revealed a hairy white torpedo of a dog coming around the corner. It was my father’s pride and joy, his husky fourteen-year-old bull terrier, Rocco. What Jake La Motta had been to middleweight fighters, Rocco was once to other dogs. As he got closer I could see his limp, and the ancient, jagged scars covering his face. Dried rivers of pain from a hundred wars.
His head bore the marks of the population growth of our family’s neighborhood. Like the rings of age in the center of a tree, each scar corresponded with the new arrival of a Doberman, a rottweiler, a German shepherd or a Great Dane. He’d fought them all as their masters built homes and eventually made the error of letting their dogs pass the perimeter of my father’s driveway. Rocco’s face was the record.