Camilleri, L'opéra de Vigáta, chap. En entreprenant de raconter… :
"Mes paroissiens très chers dans le sein du Seigneur […] sant’Austinu, saint Augustin, qui pourtant avait été du genre à faire une mauvaise vie, qui allait dans les bordels avec des femmes sales et se saoulait comme un cochon, sant’Austinu, donc, raconte qu’une fois, à Carthage, qui est un pays pas loin d’ici, vers l’Afrique, une fois il rentra dans un thriâtre et vit la raprésintation de femmes et d’hommes nus qui faisaient des choses dégueulasses et quand il s’en retourna à la maison, il ne put pas trouver le sommeil de toute la nuit, tellement il était enragé ! Et je veux vous raconter aussi une chose que raconte Tertullien, qui n’est pas une crotte de bique mais une très grosse tête. Il raconte, Tertullien, qu’une fois une femme dévote, honnête et bonne mère de famille, s’entêta à tout prix à aller au thriâtre. Ni le mari, ni le père, ni la mère, ni les fils n’y purent rien. La femme testarde regarda le spictacle, mais quand elle en sortit, elle était plus la même. Elle jurait, disait des gros mots, voulait que tous les mâles qu’elle rencontrait dans la rue la trombinent en pleine rue. Par la force, le père et ses fils la portèrent à la maison et appelèrent vite le curé. Le prêtre baigna d’eau bénite la femme et dit au diable d’en sortir. Et vous savez ce qu’il répondit, le diable.
«Toi, le curé, te mêle pas d’une chose qui m’appartient ! Moi, cette femme, je me la suis prise parce que de sa propre volonté elle est venue dans ma maison à moi, qui est le thriâtre ! »
Et la femme mourut damnée parce que le saint curé n’y put rien."