Cela, La Ruche, chap. III, trad. Astor p. 110 :
"Ce jour-là, la réunion de la crémerie était gaie.
— Apportez-nous donc quelques petites brioches, doña Ramona, c'est moi qui paie.
— Mais, ma fille, vous avez donc gagné à la loterie!
— Il y a loterie et loterie, doña Ramona ! J'ai reçu de Bilbao une lettre de la Paquita. Regardez ce qu'elle dit.
— Voyons ! Voyons !
— Lisez vous-même, moi j'y vois de moins en moins : lisez donc, tenez, là en bas.
Doña Ramona enfourcha ses besicles et lut :
— « La femme de mon fiancé est morte d'anémie pernicieuse. » Eh bien, doña Asunción, ça c'est une chance !
— Continuez, continuez !
— « Et mon fiancé dit qu'on n'a plus besoin de rien et que si je tombe enceinte on se mariera. » Mais, ma fille, vous êtes vernie, vous alors !
— Oui, grâce à Dieu, j'ai assez de chance avec cette fille-là.
— Et le fiancé, c'est le professeur ?
— Oui, don José Maria de Samas, professeur de psychologie, de logique et de morale.
— Eh bien, ma chère, toutes mes félicitations ! Vous l'avez bien casée !
— Oui, pas mal !"
Aquella tarde estaba alegre la tertulia de la lechería.
—Traiga usted unos bollitos, doña Ramona, que yo pago.
—¡Pero, hija! ¿Le ha caído a usted la lotería?
—jHay muchas loterías, doña Ramona! He tenido carta de la Paquita, desde Bilbao. Mire usted lo que dice aquí.
—¿A ver? ¿A ver?
—Lea usted, yo cada vez tengo menos vista: lea usted aquí abajo.
Doña Ramona se caló los lentes y leyó:
—"La esposa de mi novio ha fallecido de unas anemias perniciosas." ¡Caray, doña Asunción, así ya se puede!
—Siga, siga.
—"Y mi novio dice que ya no usemos nada y que si quedo en estado, pues él se casa." ¡Pero, hija, si es usted la mujer de la suerte!
—Sí, gracias a Dios, tengo bastante suerte con esta hija.
—¿Y el novio es el catedrático?
—Sí, don José María de Samas, catedrático de Psicología, Lógica y Ética.
—¡Pues, hija, mi enhorabuena! ¡Bien la ha colocado!
—¡Si, no va mal!