samedi 1 novembre 2025

Bronsky (pleurs)

Bronsky (Alina), Ma vie nest pas un roman ! chap. 10 :

"Ça faisait longtemps que je n’avais pas pleuré. Un jour, mon iPhone était tombé dans la cuvette des WC mais j’avais retenu mes larmes. Lorsque papa était parti de la maison avec toutes ses affaires, j’étais restée digne, polie et fière. Je lui avais souhaité bonne chance au plus grand désespoir de ma mère qui disjonctait et aurait voulu que moi aussi je disjoncte. Mon premier [zéro] en allemand remontait à loin mais je me souvenais encore des picotements dans mes yeux et d’une grosse boule dans la gorge, pourtant, je n’avais pas non plus pleuré. Enfin si. Dans les toilettes."

jeudi 30 octobre 2025

Larbaud (Lolita)

Larbaud, Jaune, bleu, blanc, Pléiade p. 889 :

" « Je retourne au pays chrétien, à la terre apostolique » c'est décidément l'Espagne qui est le mieux outillé des pays d'Occident, en fait de prénoms. Elle a ces prénoms-gigognes, pourvus d'un jeu de diminutifs capables d'exprimer toute espèce de nuances : l'âge, le degré de familiarité dans lequel on et avec les personnes... Lolita est une petite fille ; Lola est en âge de se marier ; Dolores a trente ans ; doña Dolores a soixante ans. Ou encore : je me permets de demander à don José des nouvelles de la jeune veuve, sa soeur, doña Dolores. Reçu « avec toute confiance », en ami de la maison, je ne tarde pas à appeler : Dolores ? Un jour, inspiré par l'amour, je murmurerai : Lola. Et, le soir des  noces, j'aurai Lolita dans mes bras. C'est le principe ; mais il y a aussi des formes, et des déformations, locales : Loliù, Lolin... La gamme entière."


mercredi 29 octobre 2025

Bronsky (diététique)

Bronsky (Alina), La Tresse de ma grand-mère :

"Comme Grand-Mère avait désormais du temps à revendre, les plats longuement bouillis et soigneuse­ment mixés ont pris le dessus. Elle préparait du chou-fleur et du brocoli au cuit-vapeur et écrasait les légumes à la fourchette comme si je n’avais pas de dents. Parfois, elle était déjà aux fourneaux avant même que je sois levé et remplissait de légumes sans sel et d’épeautre des Tupperware que je devais emporter pour mes journées d’école de plus en plus longues. Les sandwichs étaient réservés aux célibataires alcooliques, aux enfants délaissés qui rentraient seuls à la maison et aux Allemands.

Comme je déversais le contenu des boîtes dans les toilettes de l’école et me goinfrais à la place de sucreries, j’ai commencé, en plus de grandir, à m’épaissir. Et un jour, Grand-Mère a cessé de m’appeler “squelette”.

“Enfin, son système digestif fonctionne”, disait-elle à mon grand-père en pinçant mes plis de graisse."