Godard (Henri), Manuscrits de Céline p. 9-10 :
« Depuis le temps où un homme comme Gœthe commençait à collectionner des manuscrits d'écrivains, l'intérêt pour les esquisses, tant graphiques ou plastiques qu'écrites, n'a cessé de grandir. En dépit de protestations ou de rejets isolés, il n'est plus guère aujourd'hui de lecteurs qui n'aient une curiosité pour la genèse des œuvres qu'ils admirent. Pour quelques-uns qui préfèrent ne les voir que comme de calmes blocs ici-bas chus d'un désastre obscur, nous sommes sans doute infiniment plus nombreux à souhaiter considérer les œuvres dans cette quatrième dimension, le temps, dont Proust affirme vouloir doter les personnages de son roman. L'une des manières d'approfondir la connaissance d'une œuvre qui s'est imposée à nous à la lecture est de chercher à connaître son histoire : le projet initial dont elle est sortie, ses transformations, à quel moment et dans quel ordre par rapport à l'ensemble en formation, de quelle manière et s'il se peut suivant quel mécanisme ou quelle loi, sont apparus les éléments décisifs qui ont emporté notre adhésion, de quelque nature et à quelque échelle que ce soit. »