Hrabal, La Chevelure sacrifiée, trad. Ancelot chap 7 :
"Je me couche lentement, je m’étire tout entière, je suis couchée dans ce tonneau tronqué comme une aiguille dans le boîtier d’un compas, je regarde au-dessus de moi l’assemblage de poutres où disparaît la chaudière blanche, je rêve, je commence à rêver, je fonds lentement dans l’eau chaude, je flotte dans l’eau chaude comme une paillette de savon, tous mes membres se détendent, je dénoue toutes les nappes et tous les draps dans lesquels mon passé est noué, j’ouvre tous les paniers, toutes les malles, toutes les armoires où se trouvent des images qui sont arrivées depuis longtemps, mais qui consentent à me rendre visite à tout instant, de belles images, mais incolores qui attendent ce bain chaud pour finir de se développer et affirmer leurs couleurs. C’est cela, mon cinéma, que je projette sur l’écran de mes yeux fermés, un film où moi, je joue le grand rôle, moi qui suis arrivée jusqu’en ce lieu, dans cette baignoire de bois où me voilà étendue…"