Alain, Vingt Leçons sur les beaux-arts :
"On comprend aisément ce qui fait que les ruines sont belles ; c’est que, tout vain ornement étant alors rabattu, et l’attaque des forces étant marquée par mille cicatrices, néanmoins la masse résiste encore et ne se défait point ; elle s’usera à son poste et grain à grain. C’est pourquoi sans doute l’antiquité est directement vénérable ; elle prouve elle-même sa puissance ; elle atteste une longue lutte contre la nature, et par la nature même".
Alain, Système des beaux-arts :
"Ce qui plaît d'abord même dans les ruines, c'est cette puissance de durer, plus sensible encore par les blessures du temps. Nous avons plus d'une raison d'aimer les vieilles choses, mais cette résistance de la forme parle aux yeux déjà ; au lieu qu'un métal mince ou une corniche de plâtre sont des mensonges, que l'on devine d'après la forme des ornements, et dont le temps fait justice, car ces choses font des ruines laides. [...] Le temps orne les beaux édifices, en dénudant la forme durable. "
Alain, Système des beaux-Arts I, IV
"[...] L'œil retrouvera toujours, comme un des signes de la beauté, cette puissance de l'objet contre le changement, manifeste encore dans l'usure et même dans les débris des choses durables. En revanche les signes même les moins frappants d'une matière flexible, et qui cède au lieu de s'user, détruisent toujours l'effet des ornements, quand ils seraient pris des meilleurs modèles."