Kandinsky, Du Spirituel dans l'art (éd. Folio) :
p. 106 : « […] les objets habituels ont un effet totalement superficiel sur un homme de sensibilité moyenne. Ceux par contre que nous voyons pour la première fois font immanquablement un certain effet sur nous. »
p. 185-186 : « Un mouvement très simple, dont le but est inconnu, fait par lui-même l'effet d'un mouvement important, mystérieux, solennel. Et cela aussi longtemps que l'on ne connaît pas le but extérieur, pratique, du mouvement. Il agit alors comme une résonance pure. Un travail simple, exécuté en commun (par exemple les préparatifs pour soulever un grand poids) prend, lorsque le but en est inconnu, une importance si singulière, si mystérieuse, si dramatique, et si poignante qu'involontairement on s'arrête comme devant une vision, comme devant une vie sur un autre plan, jusqu'à ce que, brusquement, le charme soit rompu, que l'explication pratique vienne d'un coup, et éclaire le travail mystérieux et ses buts. Il y a dans le simple mouvement, extérieurement non motivé, une mine inépuisable de possibilités. De tels cas se produisent surtout lorsqu'on est plongé dans de profondes pensées abstraites. De telles pensées arrachent l'homme à son activité quotidienne, pratique et utilitaire. C'est pourquoi l'observation de tels mouvements simples devient possible en dehors du cercle pratique. Mais dès l'instant où l'on se souvient de ce qu'il ne peut rien se produire d'énigmatique dans nos rues, l'intérêt pour le mouvement tombe : le sens pratique du mouvement en efface le sens abstrait. »