dimanche 27 octobre 2019

Queneau (fête foraine ; souvenirs)


Queneau, Pierrot mon Ami
chap. 1 : 
« Ils ne sortirent pas de l’Uni-Park, où ce dimanche de juin déversait, et le beau temps, et la foule, conjugués en un bouillonnement noir et gueulard qu’aspergeaient de leurs feux et de leurs musiques plus de vingt attractions. Ici l’on tourne en rond et là on choit de haut, ici l’on va très vite et là tout de travers, ici l’on se bouscule et là on se cogne, partout on se secoue les tripes et l’on rit, on tâte de la fesse et l’on palpe du nichon, on exerce son adresse et l’on mesure sa force, et l’on rit, on se déchaîne, on bouffe de la poussière. »

Queneau, Pierrot mon ami 
chap. 4 : 
« Quand tu auras un passé, Vovonne, tu t’apercevras quelle drôle de chose que c’est. D’abord y en a des coins entiers d’éboulés : plus rien. Ailleurs, c’est les mauvaises herbes qui ont poussé au hasard, et l’on y reconnaît plus rien non plus. Et puis il y a des endroits qu’on trouve si beaux qu’on les repeint tous les ans, des fois d’une couleur, des fois d’une autre, et ça finit par ne plus ressembler du tout à ce que c’était. Sans compter ce qu’on a cru très simple et sans mystère quand ça s’est passé, et qu’on découvre pas si clair que ça des années après, comme des fois tu passes tous les jours devant un truc que tu ne remarques pas et puis tout d’un coup tu t’en aperçois »