Olécha, L’Envie trad. Sokologorski, coll. Points p. 126 :
"Et voilà ce que vit Kavalérov : Valia se tenait au milieu de la pelouse, les jambes largement et solidement écartées. Elle portait un petit short noir très relevé et ses jambes étaient nues très haut, – toute l'architecture de ces jambes était visible. Elle était pieds nus dans des chaussures de sport blanches, et le fait que ces chaussures soient plates rendait sa façon de se tenir encore plus stable et plus ferme. Elle n'était en rien féminine cette façon de se tenir, mais bien masculine ou enfantine. Ses jambes étaient sales, brunies et luisantes. C'étaient des jambes de petite fille, ces jambes si souvent soumises à l'action de l'air, du soleil, aux chutes sur les petites mottes et sur l'herbe et aux coups qu'elles deviennent grossières, se couvrent de petites cicatrices à cause des petites croûtes arrachées trop tôt, alors que les genoux deviennent rugueux comme de l'écorce d'orange. L'âge et la certitude subconsciente de sa richesse physique donnent à leur maîtresse le droit de prendre si peu soin de ses jambes, de ne pas s'en soucier, de ne pas les soigner. Mais plus haut, sous le short noir, la propreté et la douceur du corps laisse deviner combien merveilleuse sera leur maîtresse quand elle mûrira et deviendra femme, quand elle commencera à faire attention à son corps, quand l'envie lui viendra de l'orner, quand toutes les petites blessures seront guéries, quand les croûtes tomberont d'elles-mêmes, quand le hâle s'égalisera pour devenir teint."