Constant, par Paul Bénichou, cité par Ph. Muray, Ultima necat t. 2 p. 406-407 :
"Les problèmes de Benjamin Constant ont été ceux de toute sa génération. Il s'agissait de retrouver une assiette à l'esprit humain privé sans retour des anciennes certitudes religieuses, et désabusé des espérances de 89. Cette restauration, qui a doublé l'autre, et n'a pas été moins laborieuse, a pris le plus souvent la forme d'une mystification. Benjamin Constant est, dans son temps, un cas particulier. Il a vécu la crise dans toute sa vie à la fois privée et publique, et il a scrupuleusement refusé toute solution d'éloquence ou de trompe-l'œil. Il a même scandalisé les hommes de cette époque si attachée à ses mythes et à ses pudeurs, par l'audace avec laquelle il rejetait tout ce qui n'était qu'édifiant. Impitoyable aussi bien pour lui-même, il a paru manquer de dignité. L'accuser d'avoir failli au respect de soi est, depuis Sainte-Beuve, chose fréquente. C'est ne pas comprendre cet esprit, à la fois insatisfait et exigeant, qui n'a pas résolu les problèmes insolubles, mais qui a réussi, chose rare, à passer jusqu'à nous sans légende."