Yuzuki (Asako), Le Beurre de Manako (2017), trad. Tamae-Bouhon pp. 36 et 39 :
"Le beurre doit encore être froid, tout juste sorti du réfrigérateur. Un bon beurre doit être frais et dur, afin qu'on puisse en goûter le croquant et la saveur. Déposé sur le riz chaud, il fondra aussitôt, aussi ayez bien soin, surtout, d'en prendre une bouchée avant qu'il ramollisse. Beurre froid et riz chaud. Délectez-vous d'abord de ce contraste avant de dissoudre et de mêler ces deux ingrédients jusqui à ce qu' ils forment une fontaine dorée. Oui, même sans le voir, on peut en deviner la couleur, tant son goût est puissant. Chaque grain de riz enrobé fait clairement connaître sa présence tandis que son arôme grillé se répand de la gorge jusqu'au nez. La douceur du lait vous enveloppe la langue.[…]
Elle dépose une noisette de beurre sur le riz, avant de laisser tomber une goutte de sauce soja d'un de ces sachets qui accompagnent les plats préparés qu'elle achète à la supérette. Conformément aux instructions, elle enfourne une cuillerée de riz avant que le beurre ait eu le temps de fondre. Un souffle mystérieux s'échappe du fond de sa gorge. Il y a tout d'abord la fraîcheur du beurre, qui frappe son palais en premier. Le contraste avec le riz est saisissant, tant au niveau de la température que de la texture. Ses dents effleurent le beurre froid, assez tendre pour qu' elles pénètrent dedans jusqu'à la racine. Bientôt, comme le lui a décrit Kajii, le beurre fondu jaillit d'entre les grains de riz. Avec un goût qu'on ne peut que qualifier de doré. Une vague de saveurs miroitantes, à la richesse insoupçonnée, submerge le riz pour emporter le corps de Rika au loin."