Picon, 1853, Naissance de la peinture moderne [1974], p. 129 :
[suite et fin]
"Et pourtant – malgré cette égalité de toutes choses au sein du visible – nous sommes sensibles à la différence des images, et même à une sorte de hiérarchie. Système d'exclusion – rejetant, pour parler court, la mouvance invisible de l'image, cette peinture correspond nécessairement à un certain ordre de préférences. Elle inclut une hiérarchie fondée sur l'aptitude des choses à manifester la présence du sensible, et à s'y réduire. En ce sens, le corps imparfait de l'Olympia est plus efficace que celui d'une vénus ou même d'une odalisque d'Ingres, son imperfection attestant qu'il a été vu et non pas imaginé. Une nature morte est moins équivoque qu'un portrait, qui risque toujours de signifier au-delà du visible, mais une botte d'asperges est tout de même une manifestation moins complète, moins éclatante que ces spectacles où la puissance du visible a été convoquée dans sa multiplicité : champ de courses, bal à l'Opéra, musique aux Tuileries, plus tard bar des Folies-Bergère, Moulin de la Galette, eaux de la Grenouillère…"