Céline, Entretiens avec le Professeur Y, Pléiade p. 497 :
"[...] je trouve rien de plus vulgaire, de plus commun, de plus dégoûtant que les idées ! les bibliothèques en sont pleines ! et les terrasses des cafés !... tous les impuissants regorgent d'idées !... et les philosophes !... c’est leur industrie les idées !... ils esbrouffent la jeunesse avec ! ils la maquereautent !... la jeunesse est prête vous le savez à avaler n'importe quoi... à trouver tout : formidââââble ! s'ils l’ont commode donc les maquereaux ! le temps passionné de la jeunesse passe à bander et à se gargariser d' «idéaas» !... de philosophies, pour mieux dire !... oui, de philosophies, Monsieur !... la jeunesse aime l’imposture comme les jeunes chiens aiment les bouts de bois, soi-disant os, qu'on leur balance, qu’ils courent après ! ils se précipitent, ils aboyent, ils perdent leur temps, c’est le principal !... aussi, voyez tous les farceurs pas arrêter de faire joujou avec la jeunesse... de lui lancer plein de bouts de bois creux, philosophiques... si elle s'époumone, la jeunesse !... et si elle biche !... qu'elle est reconnaissante !... ils savent ce qu'il lui faut, les maquereaux ! des idéâs !... et encore plus d'idéâs ! des synthèses ! et des mutations cérébrales !... au porto ! au porto, toujours ! logistique ! formidààààble !... plus que c’est creux, plus la jeunesse avale tout ! bouffe tout ! tout ce qu'elle trouve dans les bouts de bois creux... idéââs !... joujoux ! [...]"