Shelley, Défense de la poésie :
« Non seulement [le poète] voit intensément le présent tel qu'il est, et découvre les lois selon lesquelles les choses présentes devraient être ordonnées, mais il voit également l'avenir dans le présent, et ses pensées sont les germes de la fleur et du fruit des temps derniers […]. Le grand secret de la morale est l'amour, cette saillie hors de nous-même, et notre identification à la beauté d'une pensée, d'une action, ou d'une personne qui n'est pas nous. Pour être vraiment bon, un homme doit imaginer avec force et étendue ; il doit se mettre à la place d'un autre, et de bien d'autres ; les peines et les plaisirs de ses semblables doivent devenir les siens. […] La poésie sauve du déclin les visitations de la divinité dans l'homme. […] Peut-être [les poètes] sont-ils eux-mêmes les plus sincèrement surpris par ses manifestations ; car c'est moins leur esprit que l'esprit de leur siècle. Les poètes sont les hiérophantes d'une inspiration imprévue ; les miroirs des ombres gigantesques que l'avenir projette sur le présent ; les mots qui expriment ce qu'ils ne comprennent pas ; les trompettes qui sonnent la bataille et ne sentent pas ce qu'elles inspirent ; l'influence qui n'est pas mue mais qui meut. Les poètes sont les législateurs non reconnus du monde. »
A Defence of Poetry
« […] For he not only beholds intensely the present as it is, and discovers those laws according to which present things ought to be ordered, but he beholds the future in the present, and his thoughts are the germs of the flower and the fruit of latest time. […] The great secret of morals is love; or a going out of our nature, and an identification of ourselves with the beautiful which exists in thought, action, or person, not our own. A man, to be greatly good, must imagine intensely and comprehensively; he must put himself in the place of another and of many others; the pains and pleasure of his species must become his own. […] Poetry redeems from decay the visitations of the divinity in man. […] And they are themselves perhaps the most sincerely astonished at its manifestations; for it is less their spirit than the spirit of the age. Poets are the hierophants of an unapprehended inspiration; the mirrors of the gigantic shadows which futurity casts upon the present; the words which express what they understand not; the trumpets which sing to battle, and feel not what they inspire; the influence which is moved not, but moves. Poets are the unacknowledged legislators of the world. »