Ramuz,Vendanges IV, éd. Séquences, Rezé, 2002, p. 64 :
"On était là où l'homme reste toujours le même, et la grande odeur est restée la même, et ses effets sur le cœur de l'homme sont les mêmes, – rien n'est changé ici depuis le temps de Noé, parce que nous sommes tous sortis de lui. Je l'ai vu couché sur le pavé avec sa barbe, sa grande barbe blanche, et ses deux chiens courants rôdaient avec inquiétude autour de lui. Les femmes étaient allées dormir, tandis qu'on entendait le grand bruit du pressoir, qui, lui, ne cesse pas, qui ne cesse jamais ; et Cham était sorti le premier du pressoir où ses frères étaient restés. Il a été les chercher au pressoir et, se tenant debout sur la porte du pressoir, il les appelle. Noé n'entend rien ; Noé, quand ils viennent, ne les voit pas venir. Et depuis lors une malédiction est sur Chanaan, fils de Cham, et sur les enfants de Chanaan. C'est ce qu'on nous enseignait dans nos leçons d'histoire biblique, mais je n'aurais pas eu besoin de ces leçons. L'histoire de Noé, je l'ai vue, j'ai vu Noé ivre de vin nouveau."