jeudi 9 juin 2022

Leibniz (monopsychisme)

Leibniz, Considérations sur la doctrine d’un esprit universel unique [1702], éd. Gerhardt p. 221 : 

"Plusieurs personnes ingénieuses ont cru et croient encore aujourd'hui qu'il n'y a qu'un seul Esprit, qui est Universel, et qui anime tout l'univers et toutes ses parties, chacune suivant sa structure et suivant les organes qu'il trouve, comme un même souffle de vent fait sonner différemment divers tuyaux d'orgue [...]. Aristote a paru à plusieurs d'une opinion approchante, qui a été renouvelée par Averroès, célèbre philosophe arabe. Il croyait qu'il y avait en nous un intellectus agens, ou entendement actif, et aussi un intellectus patiens, ou entendement passif ; que le premier, venant du dehors, était éternel et universel pour tous, mais que l'entendement passif, particulier à chacun, s'éteignait dans la mort de l'homme. Cette doctrine a été celle de quelques Péripatéticiens depuis deux ou trois siècles, comme de Pomponazzi, Contarini et autres ; et on en reconnaît les traces dans feu M. Naudé [...]. Lorsqu'on va jusqu'à dire que cet Esprit universel est l'esprit unique, et qu'il n'y a point d'âmes ou esprits particuliers, ou du moins que ces âmes particulières cessent de subsister, je crois qu'on passe les bornes de la raison, et qu'on avance sans fondement une doctrine, dont on n'a pas même de notion distincte. [...] Ce n'est pas assez d'en avoir une imagination, qui en effet n'est fondée que sur une comparaison fort clochante du souffle qui anime les organes de Musique."