lundi 21 mars 2022

Goethe + Valéry (sensibilité)

Goethe, Conversations avec Eckermann p. 209 : 

"L’œil éprouve le besoin du changement et [...] n’aime pas s’arrêter longtemps sur la même couleur, mais en requiert une autre, et avec tant d’impétuosité qu’il se la crée lui-même quand il ne la trouve pas dans la réalité [...]. Il n’est est pas seulement ainsi pour tous nos sens, mais aussi pour des facultés plus élevées de notre être."


Valéry, Cahiers Pléiade 1-1168 

"Les sens "reçoivent" sans doute. Mais ils 'demandent' aussi. C'est un point capital, toujours oublié."

Valéry, Notion générale de l'Art pléiade 1-1409 : 

"[l'activité artistique] s'oppose [...] d'elle-même au loisir vide. La sensibilité, qui est son principe et sa fin, a horreur du vide. Elle réagit spontanément contre la raréfaction des excitations. Toutes les fois qu'une durée sans occupation ni préoccupation s'impose à l'homme, il se fait en lui un changement d'état marqué par une sorte d'émission, qui tend à rétablir l'équilibre des échanges entre la puissance et l'acte de la sensibilité. Le tracement d'un décor sur une surface trop nue, la naissance d'un chant dans un silence trop ressenti, ce ne sont que des réponses, des compléments, qui compensent l'absence d'excitations - comme si cette absence, que nous exprimons par une simple négation, agissait positivement sur nous. On peut surprendre ici le germe même de la production de l'œuvre d'art."