Bartelt, Chaos de famille :
"Dans les pièces du bas, les beaux-frères et les belles-sœurs gueulaient comme à l’asile. Il avait encore dû se passer des choses. Genre psychodrame.
Avant de m’en aller, j’avais entendu Maurice protester avec une véhémence de sourdingue :
— On ne peut pas parler de la schizophrénie comme des hémorroïdes, Bernard ! La schizophrénie, c’est dans la tête ! C’est une maladie noble !
— Tu m’as mal compris, Maurice, disait Bernard. Je parle de la souffrance. Quand on souffre on souffre. La souffrance est la souffrance.
— T’as parlé des hémorroïdes, je m’excuse.
— Oui. Pour dire que la souffrance, c’est la souffrance, Maurice !
— La schizophrénie, hurlait Maurice, c’est dans la tête, merde, Bernard ! Dans la tête ! Dans la tête !
— Je ne te parle pas de la tête, Maurice ! Je te parle de la souffrance !
— Pour moi, la schizophrénie c’est une maladie de la grande intelligence, tu vois ! Chez les écrivains, les cinéastes, les peintres, et même chez les psychiatres, y a du schizophrène. C’est d’ailleurs ce qui fait le prix de notre souffrance.
— Moi je dis que souffrir de schizophrénie ou souffrir de…
— Attention, Bernard, pas d’amalgame ! Pas d’amalgame ! Surtout pas d’amalgame !
— J’ai le droit de dire aussi, moi, parce que je suis aussi schizophrène que toi, Maurice, tu le sais bien, aussi schizophrène, malgré que je sois plus jeune, mais comme j’ai aussi des hémorroïdes, j’estime que je suis bien placé pour comparer. Et pour affirmer que souffrir c’est souffrir !"