Divry, La Cote 400 :
"Je suis de celles qui pensent que l’entrée d’un livre en bibliothèque doit être une reconnaissance. Une distinction. Une élévation. Que la bibliothécaire doit apporter un supplément de culture aux lecteurs, en opérant un choix parmi les flots de l’industrie du livre. Il faut se défendre. Leurs gentilles histoires larmoyantes, il faut leur couper la tête, c’est ce que je dis à monsieur Pratier, tapez dans le lard ! Je m’entends bien avec mon boucher, Gustave Pratier, on se comprend. C’est pas un snob, lui, pas de chichis. Comme le boucher taille au couteau la bête morte pour sortir les meilleurs morceaux, il faut trancher dans le vif. Écarter le gras. Pas de pitié pour les mauvais livres. Et, dans le doute, soyons méchants. Telle est ma devise. Mais cette manière de voir est terminée, achevée, je suis de la vieille école. Quand vous entrez dans ma bibliothèque, que voyez-vous en premier ? Les blancs-becs du rayon bandes dessinées. A côté, le rayon musique. Juste derrière, le rayon dévédés. Voilà où nous mène la démocratie culturelle. Ce n’est plus une bibliothèque où règne le silence feutré des rayonnages intelligents, c’est une aire de loisir où l’on vient se distraire. »