Léautaud, Journal, 29 avril 1936, Folio p. 800 :
« Allez-vous quelquefois vous promener dans les faubourgs, Léautaud ? Avez-vous vu les enfants qu'on y voit ? Des enfants qui ont déjà l'air de petits vieux. Des enfants qui vivent en tas dans des logements sans espace, sans air. C'est affreux à penser. » J'ai répliqué à Hirsch : « Voilà encore qui m’est parfaitement indifférent. Ces gens chargés d'enfants n'avaient qu'à ne pas les faire. Je lis quelquefois dans un journal que tel individu ne trouve pas à se loger parce qu'il a cinq ou six enfants et qu’on veut pas de lui. Qu'est-ce que vous voulez que cela me fasse ? Il n'avait qu'à ne pas les faire. Il a coupé dans les bobards qu'on débite aux gens pour qu’ils fassent des enfants. Tant pis pour lui. Est-ce que j’ai fait des enfants, moi, est-ce que je me suis marié sachant que je n'étais pas en situation de faire vivre une femme ? Il y avait surtout, il est vrai, mon goût absolu d'indépendance. Je me refuse, en tout cas, à nourrir les enfants des gens qui ont eu la bêtise de les faire. »