Gide, Journal (anthol. Folio p. 81-82) :
"1er décembre 1905. Chez Fontaine, Paul Claudel est là que je n’ai pas revu depuis plus de trois ans. Jeune, il avait l’air d’un clou ; il a l’air maintenant d’un marteau-pilon. Front très peu haut, mais assez large ; visage sans nuances, comme taillé au couteau ; cou de taureau continué tout droit par la tête, où l’on sent que la passion monte congestionner aussitôt le cerveau. Oui, je crois que c’est là l’impression qui domine : la tête fait corps avec le tronc. Je le regarderai mieux mardi prochain (il vient déjeuner chez nous) ; j’étais occupé un peu trop à me défendre et n’ai répondu qu’à demi à ses avances. Il me fait l’effet d’un cyclone figé. Quand il parle on dirait que quelque chose en lui se déclenche ; il procède par affirmations brusques et garde le ton de l’hostilité même quand on est de son avis."