Leibniz, Monadologie §§ 26-28.
"La mémoire fournit une espèce de consécution aux âmes, qui imite la raison, mais qui en doit être distinguée. C’est que nous voyons que les animaux ayant la perception de quelque chose qui les frappe, et dont ils ont eu perception semblable auparavant, s’attendent, par la représentation de leur mémoire, à ce qui y a été joint dans cette perception précédente, et sont portés à des sentiments semblables à ceux qu’ils avaient pris alors. Par exemple, quand on montre le bâton aux chiens, ils se souviennent de la douleur qu’il leur a causée et crient et fuient.
Et l’imagination forte qui les frappe et meut, vient ou de la grandeur ou de la multitude des perceptions précédentes ; car souvent une impression forte fait tout d’un coup l’effet d’une longue habitude ou de beaucoup de perceptions médiocres réitérées.
Les hommes agissent comme les bêtes, en tant que les consécutions de leurs perceptions ne se font que par le principe de la mémoire ; ressemblant aux Médecins Empiriques, qui ont une simple pratique sans théorie ; et nous ne sommes qu’Empiriques dans les trois quarts de nos actions. Par exemple, quand on s’attend qu’il y aura jour demain, on agit en Empirique parce que cela s’est toujours fait ainsi, jusqu’ici. Il n’y a que l’Astronome qui le juge par raison."
Un texte par jour, ou presque, proposé par Michel PHILIPPON (littérature, philosophie, arts, etc.).