Rougemont, Le Paysan du Danube :
« Paradoxe du sentiment.
Un rumeur lointaine et continue, nous l'entendons seulement lorsqu'elle cesse, ou bien lorsqu'elle grandit soudain. Ainsi de la rumeur en nous du sang qui court ; ainsi de la respiration. Il n'y a conscience que du discontinu.
Il n'y a sentiment que de ce qui nous quitte, ou nous surprend, ou bien encore au fond de l'être nous déchire et nous ressuscite. A la naissance du sentiment, nous trouvons invariablement une contradiction interne, une séparation, quelque chose qui fait défaut et quelque chose qui vient combler ce vide. Une angoisse qui est un appel, et qui crée sa réponse — en vain. »