De Gaulle, Du Patriotisme [1913] in Lettres, notes et carnets t 1, cité par ean-Luc Barré, De Gaulle, une vie t.1 : L'homme de personne, 1890-1944 1° partie chap. 3 :
"Rien ne sait davantage réveiller dans un peuple les mâles vertus et les nobles enthousiasmes que le sentiment de la patrie en danger. Rien ne porte à sa valeur morale de plus funestes coups qu’une longue paix, et des coups d’autant plus terribles qu’ils sont moins soudains et peu sûrs. C’est l’histoire des Perses, efféminés et affaiblis par leur mépris du métier des armes et chez qui les vices régnaient en maîtres. L’explication de ces faits historiques n’est pas difficile à fournir. Les vertus d’un guerrier, tout en pouvant paraître brutales à certains, n’en sont pas moins absolument généreuses et désintéressées. En voyant sa patrie menacée par des ennemis ambitieux, le citoyen comprend de suite la nécessité où il se trouve de rester viril pour la mieux défendre. Tandis qu’une paix prolongée provoque l’amour du gain et le désir du vice. Certes, la guerre traîne après elle bien des maux ; certes, ce serait un grand crime pour un peuple que de la déchaîner sans raison, mais c’en serait un autre que de vouloir la détruire « car sans elle, disait M. de Molkte, sans elle le monde pourrirait ». La guerre développe dans le cœur de l’homme beaucoup de ce qu’il y a de bien ; la paix y laisse croître tout ce qu’il y a de mal […]. La guerre est une loi de la nature, et la nature ne veut pas qu’on porte atteinte à ses lois."