Sallis, Bois mort [Cypress Grove], traduction Estournet & Seago, chap. 7 :
" — Vous n’êtes pas flic, non ?
— Plus depuis longtemps. Je l’ai été.
Elle attendit, et au bout d’un moment je lui racontai les grandes lignes.
— Une autre vie comme dans les Anabac.
— Quoi ?
— Ces résumés de grands livres que lisent les étudiants au lieu de lire les livres eux-mêmes. Nous sommes nombreux à ressentir notre vie comme ça. Nous définissons qui nous sommes et ce que nous sommes en quelques rapides coups de pinceau, puis nous nous évertuons à coller à cette image. Toutes les bonnes choses, les petits trucs et les détails qui rendent le reste valable — le café et le journal du dimanche matin, le goût du pain qui sort du four, le frisson du vent sur la peau, la présence de celui qu’on aime – , tout ça est mis de côté. Négligé, perdu.
— Si on laisse faire.
— Si on laisse faire, oui."
"You’re not a cop, are you ?”
“Not for a long time. I was.”
She waited, and after a moment I told her the basics.
“Another Cliff Notes life.”
“What ?”
“Those pamphlets on great books that students read instead of the books themselves. A lot of us experience our lives that way. Sum up who we are and what we’re about as a few broad strokes, then do our best to cleave to it. All the good stuff, the small things and distinctions that make the rest worthwhile – Sunday mornings sitting over coffee and the paper, taste of bread fresh from the oven, the feel of wind on your skin, sensing the one you love there beside you – all these get pushed aside. Unnoticed, lost.”
“If we let them.”
“If we let them, right"