Nabokov, Ada, I, XXVII, trad. Chahine et Blandenier, revue par l'auteur :
"Notre professeur de littérature française soutient que l’exposé de l’affaire Marcel-Albertine est compromis, de bout en bout, par un vice philosophique (et, partant, artistique) rédhibitoire ; le roman n’a de sens que pour le lecteur qui sait que le narrateur est une folle et que les bonnes grosses joues d’Albertine ne sont autres que les bonnes grosses fesses d’Albert. Si l’on ne suppose pas ou si l’on n’exige pas que le lecteur a ou ait tout appris des particularités sexuelles de l’auteur à seule fin de savourer son œuvre jusqu’à la dernière goutte, le livre entier perd toute signification. Selon mon professeur, si le lecteur ignore tout de la perversion proustienne, la description détaillée des tourments d’un hétérosexuel jaloux d’une homosexuelle est une absurdité manifeste, pour la raison qu’un homme normal ne peut être qu’amusé et même réjoui par les ébats de sa petite amie avec une partenaire du même sexe. Conclusion de mon professeur : un roman qui ne peut être apprécié que par quelque petite blanchisseuse qui se serait penchée sur le linge sale de l’auteur est, du point de vue artistique, un fiasco."
Our professor of French literature maintains that there is a grave philosophical, and hence artistic, flaw in the entire treatment of the Marcel and Albertine affair. It makes sense if the reader knows that the narrator is a pansy, and that the good fat cheeks of Albertine are the good fat buttocks of Albert. It makes none if the reader cannot be supposed, and should not be required, to know anything about this or any other author's sexual habits in order to enjoy to the last drop a work of art. My teacher contends that if the reader knows nothing about Proust's perversion, the detailed description of a heterosexual male jealously watchful of a homosexual female is preposterous because a normal man would be only amused, tickled pink in fact, by his girl's frolics with a female partner. The professor concludes that a novel which can be appreciated only by quelque petite blanchisseuse who has examined the author's dirty linen is, artistically, a failure.'