Calvino, L'entrée en guerre, nouvelle [1954], trad. Deschamps-Pria :
"Autour de nous, les réfugiés étaient en train de transformer les locaux scolaires en un misérable village avec son labyrinthe de rues, déployant des draps et les accrochant à des cordes pour se déshabiller, renfonçant les clous de leurs chaussures, lavant leurs chaussettes et les mettant à sécher, tirant de leurs ballots des fleurs de courge frites et des tomates farcies, se cherchant, se comptant, perdant et retrouvant leurs affaires.
Mais la caractéristique évidente de cette humanité, le thème discontinu mais réitéré qui le premier sautait aux yeux – de la même façon que lorsqu'on entre dans une salle de réception l'œil ne voit que les seins et les épaules des dames les plus décolletées –, c'était la présence au milieu d'eux des estropiés, des idiots goitreux, des femmes à barbe, des naines, c'étaient les lèvres et les nez déformés par les lupus, c'était le regard désarmé des cas de delirium tremens : visage ténébreux des villages de montagne qui maintenant était obligé de se dévoiler, de s'afficher, vieux secret des familles paysannes autour duquel les maisons des villages se serrent l'une à l'autre comme les écailles d'une pomme de pin. Chassés de leur tanière obscure, ils essayaient maintenant, dans la blancheur bureaucratique de cette architecture de se recréer un refuge, un équilibre."
Intorno i profughii stavano trasformando i locali scolastici in un labirinto di vie di povero paese, sciorinando lenzuola e legandole a corde per spogliarsi, ribattendo chiodi alle scarpe, lavando calze e mettendole a stendere, traendo dai fagotti fiori di zucca fritti e pomodori ripieni, e cercandosi, contandosi, perdendo e ritrovando roba.
Ma il dato caratteristico di quest'umanità, il tema discontinuo ma sempre ricorrente e che per primo veniva allo sguardo – cosi come entrando in una sala di ricevimento l'occhio vede solo i seni e le spalle delle dame piú scollate – era la presenza in mezzo a loro degli storpi, degli scemi gozzuti, delle donne barbute, delle nane, erano le labbra e i nasi deformati dai lupus, era l'inerme sguardo degli ammalati di delirium tremens : era questo volto buio dei paesi montanari ora obbligato a svelarsi, a sfilare in parata, il vecchio segreto delle famiglie contadine attorno a cui le case dei paesi si stringono una all'altra come le scaglie d'una pigna. Ora, stanati dal loro buio, ritentavano in quel burocratico biancore edilizio di trovare un rifugio, un equilibrio.