samedi 27 mars 2021

Cercas (roman)

 Cercas J., Le Point aveugle, II, trad. Beyer-Grujicic, Actes Sud :

« Les romans et les nouvelles du point aveugle ne sont pas ceux qui contiennent des ambiguïtés, des contradictions, des paradoxes et des ironies, parce que tout bon roman et toute bonne nouvelle en contiennent ; les romans et les nouvelles du point aveugle sont ceux qui placent l’ambiguïté, la contradiction, le paradoxe et l’ironie en leur centre, afin que leur puissance irradie tout le texte. Plus une œuvre est ambiguë, meilleure elle est, parce que plus polysémique : elle induit ou admet davantage d’interprétations, et peut recouvrir davantage de sens. Inutile de préciser qu’il ne faut pas confondre l’ambiguïté avec l’indéfinition : l’indéfinition bloque le sens, ou le dilue, alors que l’ambiguïté le déploie, multipliant les interprétations. Rien ne contribue davantage à rendre ambigus ou polysémiques un roman ou une nouvelle que le point aveugle – ce point à travers lequel le roman ou la nouvelle voient, ce silence à travers lequel ils sont éloquents, cette obscurité à travers laquelle ils illuminent ; rien davantage que le point aveugle ne contribue à alimenter le sens d’un roman ou d’une nouvelle, à accroître la quantité de sens qu’ils sont capables de générer. »

 

Las novelas y los relatos del punto ciego no son los que contienen ambigüedades, contradicciones, paradojas e ironías, porque toda buena novela o todo buen relato las contiene ; las novelas y relatos del punto ciego son aquellos que colocan la ambigüedad, la contradicción, la paradoja y la ironía en su mismo centro, para que su poder irradie por todo el texto. Cuanto más ambigua una obra, mejor es, porque es más polisémica : porque más interpretaciones induce o admite, y más sentido es capaz de abarcar ; sobra decir que no hay que confundir la ambigüedad con la indefinición : la indefinición bloquea el significado, o lo diluye, mientras que la ambigüedad lo dispara, multiplicando las interpretaciones de un texto. Nada contribuye a hacer más ambigua o polisémica una novela o un relato que el punto ciego — ese punto a través del cual la novela o el relato ven, ese silencio a través del cual son elocuentes, esa oscuridad a través de la cual iluminan ; nada contribuye tanto como el punto ciego a cebar de sentido una novela o relato, a incrementar el volumen de significado que es capaz de generar.