Senault, L'Homme criminel ou la corruption de la nature par le péché selon la doctrine de saint Augustin, 1644 [p. 686-687] :
"L'amour de la peinture est encore plus inutile que celle* des fleurs, car quelque effort que fassent les peintres, ils ne sauraient égaler la nature, leurs ouvrages seront toujours moins achevés que ses productions, et leurs pinceaux pour savants qu'ils puissent être ne représenteront jamais parfaitement les roses et les lis qui croissent dans nos parterres. Cependant, nous voyons des hommes de condition qui font des cabinets de peinture, qui tirent vanité des tableaux dont les peintres ont tiré du profit, qui passent leur vie à remarquer le coloris du Bassan ou du Caravage, qui s'étudient à discerner une copie d'un original [...] On appelle cet exercice un honnête divertissement, on ne s'accuse jamais d'avoir donné tout son temps, son bien, son amour à cette occupation inutile, et on ne croit pas être coupable quand on a fait une idole de l'ouvrage d'un sculpteur ou d'un peintre."
* amour, au singulier, mot parfois (rarement) féminin.