Lurie, La ville de nulle part, trad. E. Gille, 2, chap. 6 p. 78 :
"Elle ne vit tout d'abord que des derrières. Des derrières roses de Boucher ; des derrières blancs d'Ingres ; des derrières brumeux d'impressionnistes et des derrières charnus, plantureux, de Rubens. La collection se composait presque entièrement de nus. Des femmes dévoilées s'étalaient sur des sofas, étreignaient dans des poses nonchalantes des personnages ou des urnes, baissaient les yeux avec des sourires aguichants ou jetaient des regards audacieux par-dessus leurs épaules rondes, au milieu de leurs cadres dorés, aux épaisses moulures. En dessous, le long des murs, des sofas anciens aux pieds en forme de pattes d'animaux, recouverts de brocart rose et or, semblaient attendre le bon plaisir de cette foule de putains. On eût dit qu'une sensualité vulgaire sourdait même des rares paysages et natures mortes : les paniers de fruits mûrs, humides, répétaient les mêmes formes."
Her first impression was one of behinds. Rose-pink behinds by Boucher; white behinds by Ingres ; misty Impressionist behinds and full, fleshy Rubens behinds. Nearly all the paintings in the room were of nudes. They lay spread out on sofas — they lolled half-erect, embracing people or urns ; they cast their eyes down provocatively, or looked boldly over their rounded shoulders out of thick, sticky gold frames. At intervals along the walls below them stood antique sofas with the legs of beasts, covered in rose and gold brocades, as if awaiting the convenience of this crowd of whores. Even the few landscapes and still-lifes seemed to ooze a vulgar sensuality : the baskets of ripe, dewy fruit and the sunlit hills repeated the same forms.
Un texte par jour, ou presque, proposé par Michel PHILIPPON (littérature, philosophie, arts, etc.).