Girardin (Delphine de), La Canne de M. de Balzac, préface :
"Il y avait dans ce roman...
– Mais ce n’est pas un roman.
– Dans cet ouvrage...
– Mais ce n’est pas un ouvrage.
– Dans ce livre...
– C’est encore moins un livre.
– Dans ces pages enfin... il y avait un chapitre assez piquant intitulé :
Le conseil des ministres
On a dit à l’auteur :
– Prenez garde, on fera des applications, on reconnaîtra des personnages ; ne publiez pas ce chapitre.
Et l’Auteur docile a retranché le chapitre.
Il y en avait un autre intitulé :
Un rêve d'amour
C’était une scène d’amour assez tendre, comme doit l’être une scène de passion dans un roman.
On a dit à l’auteur :
– Il n’est pas convenable pour vous de publier un livre où la passion joue un si grand rôle ; ce chapitre n’est pas nécessaire, supprimez-le.
Et l’Auteur timide a retranché ce second chapitre.
Il y avait encore dans ces pages deux pièces de vers.
L’une était une satire.
L’autre une élégie.
On a trouvé la satire trop mordante.
On a trouvé l’élégie trop triste, trop intime.
L’Auteur les a sacrifiées... mais il est resté avec cette conviction : qu’une femme qui vit dans le monde ne doit pas écrire, puisqu’on ne lui permet de publier un livre qu’autant qu’il est parfaitement insignifiant."