Yourcenar, Les Yeux ouverts p. 191 :
"C'est une responsabilité grave pour le traducteur : l'œuvre de quelqu'un d'autre est mise entre mes mains, et je sais bien que je ne réussirai jamais à tout donner, à tout rendre. […] Un traducteur ressemble à quelqu'un qui fait sa valise. Elle est ouverte devant lui ; il y met un objet, et puis il se dit qu'un autre serait peut-être plus utile, alors il enlève l'objet, puis le remet, parce que, réflexion faite, on ne peut s'en passer. En vérité, il y a toujours des choses que la traduction ne laisse pas transparaître, alors que l'art du traducteur serait de ne rien laisser perdre. On n'est donc jamais réellement satisfait. Mais c'est vrai aussi des livres originaux que nous écrivons, et dont Valéry aurait pu dire qu'ils étaient une traduction de la langue 'self' dans une langue accessible à tous."