Rilke, lettre à Clara Rilke, 2 septembre 1902, Correspondance (traduction Briod / Jaccottet / Klossowski) Seuil p. 23 :
« D'immenses vitrines, pleines d'admirables fragments de La Porte de l'Enfer. Cela défie la description. Rien que des fragments, côte à côte, sur des mètres. Des nus de la grandeur de ma main, d'autres plus grands, mais rien que des morceaux, à peine un nu entier : souvent un morceau de bras, un morceau de jambe tels qu'ils se présentent, côte à côte, et tout près, le tronc qui leur revient. Ailleurs le torse d'une figure contre lequel se presse la tête d'une autre, le bras d'une troisième... comme si une tempête indicible, un cataclysme sans précédent s'étaient abattus sur cette œuvre. Pourtant, mieux on regarde, plus profondément on ressent que tout cela serait moins entier si chaque figure l'était. Chacun de ces débris possède une cohérence si exceptionnelle et si saisissante, chacun est si indubitable et demande si peu à être complété que l'on oublie que ce ne sont que des parties, et souvent des parties de corps différents, qui se rassemblent si passionnément ici. On devine soudain qu'envisager le corps comme un tout est plutôt l'affaire du savant, et celle de l'artiste, de créer à partir de ces éléments de nouvelles relations, de nouvelles unités, plus grandes, plus légitimes, plus éternelles... »
sur Rilke et Rodin :
http://www.musee-rodin.fr/fr/ressources/fiches-educatives/rencontre-rodin-et-rilke
L'écriture de Rilke :
Da sind Riesenvitrinen, ganz erfüllt mit wundervollen Bruchstücken der Porte de L'Enfer. Es ist nicht zu beschreiben. Da liegt es meterweit nur Bruchstücke, eines neben dem andern. Akte in der Größe meiner Hand und größer ... aber nur Stücke, kaum einer ganz: oft nur ein Stück Arm, ein Stück Bein, wie sie so nebeneinanderhergehen, und das Stück Leib, das ganz nahe dazu gehört. Einmal der Torso einer Figur mit dem Kopf einer anderen an sich angepreßt, mit dem Arm einer dritten ... als wäre ein unsäglicher Sturm, eine Zerstörung ohnegleichen über dieses Werk gegangen. Und doch, je näher man zusieht, desto tiefer fühlt man, daß alles das weniger ganz wäre, wenn die einzelnen Körper ganz wären. Jeder dieser Brocken ist von einer so eminenten ergreifenden Einheit, so allein möglich, so gar nicht der Ergänzung bedürftig, daß man vergißt, daß es nur Teile und oft Teile von verschiedenen Körpern sind, die da so leidenschaftlich aneinanderhängen. Man fühlt plötzlich, daß es mehr Sache des Gelehrten ist, den Körper als Ganzes zu fassen - und vielmehr des Künstlers, aus den Teilen neue Verbindungen zu schaffen, neue, größere, gesetzmäßigere Einheiten ... ewigere ...