Tanizaki [en note de l'édition Pléiade (1-1890) de l'Éloge de l'ombre, est donné un passage d'un autre essai] :
« Quand on examine les textes classiques, on voit que les mêmes mots sont employés à maintes et maintes reprises, mais que, par une loi naturelle, ils se voient selon les cas investis d'une extension particulière, qu'à chaque fois une ombre les cerne comme une sorte de halo, et qu'ils se doublent d'un arrière-plan. [...] Autrement dit, le moindre mot se fait suggestion, met en branle l'imagination du lecteur, fait en sorte que ce dernier supplée de lui-même aux insuffisances de l'expression. La plume de l'auteur se contente de solliciter l'imagination du lecteur. Voilà en quoi consiste l'esprit de nos classiques, alors que l'écriture des Occidentaux serre le sens le plus étroitement, le plus précisément qu'il est possible, sans tolérer la moindre ombre, sans ménager la moindre place vacante pour l'imagination du lecteur. De notre point de vue, leur façon de dire les choses d'une manière si catégorique manque par trop de pouvoir suggestif, tandis que la nôtre est pour eux hermétique et reste impuissante à les convaincre. »