lundi 21 octobre 2019

Goethe (unité du moi)


Goethe, Conversations avec Eckermann trad. Délerot p. 314   : 
« […] Un colosse se compose de fragments, et […] l'Hercule de l'antiquité lui-même était un être collectif, qui réunissait sur son nom avec ses exploits les exploits d'autres héros. — Au fond, nous avons beau faire, nous sommes tous des êtres collectifs ; ce que nous pouvons appeler vraiment notre propriété, comme c'est peu de chose ! et, par cela seul, comme nous sommes peu de chose ! Tous, nous recevons d'autrui, tous nous apprenons, aussi bien de ceux qui existaient avant nous que de nos contemporains. Le plus grand génie lui-même n'irait pas loin s'il était obligé de tout prendre en lui-même. Mais beaucoup d'excellentes gens ne comprennent pas cela, et avec leurs rêves d'originalité ils passent la moitié de leur vie à tâtonner dans l'obscurité. J'ai connu des artistes qui se vantaient de n'avoir suivi aucun maître, et de tout devoir à leur génie. Les fous ! comme si c'était possible ! Comme si le monde, à chacun de leurs pas, ne s'imposait pas à eux, et malgré leur sottise native, ne faisait point d'eux quelque chose ! Oui, je soutiens qu'un artiste qui ne ferait que passer devant les murs de cette chambre, et ne jetterait qu'un rapide coup d'œil sur les quelques dessins de grands maîtres qui y sont fixés, sortirait d'ici tout autre et plus grand, pour peu qu'il eût de génie ! Qu'y a-t-il de bon en nous, si ce n'est la force et le goût de nous approprier les éléments du monde extérieur et de nous en servir pour un but élevé ? » 

[…] sie vergessen, daß auch der Koloß aus einzelnen Teilen besteht und daß auch der Herkules des Altertums ein kollektives Wesen ist, ein großer Träger seiner eigenen Taten und der Taten anderer. Im Grunde aber sind wir alle kollektive Wesen, wir mögen uns stellen, wie wir wollen. Denn wie weniges haben und sind wir, das wir im reinsten Sinne unser Eigentum nennen! Wir müssen alle empfangen und lernen, sowohl von denen, die vor uns waren, als von denen, die mit uns sind. Selbst das größte Genie würde nicht weit kommen, wenn es alles seinem eigenen Innern verdanken wollte. Das begreifen aber viele sehr gute Menschen nicht und tappen mit ihren Träumen von Originalität ein halbes Leben im Dunkeln. Ich habe Künstler gekannt, die sich rühmten, keinem Meister gefolgt zu sein, vielmehr alles ihrem eigenen Genie zu danken zu haben. Die Narren! Als ob das überhaupt anginge! Und als ob sich die Welt ihnen nicht bei jedem Schritt aufdränge und aus ihnen, trotz ihrer eigenen Dummheit, etwas machte! Ja ich behaupte, wenn ein solcher Künstler nur an den Wänden dieses Zimmers vorüberginge und auf die Handzeichnungen einiger großer Meister, womit ich sie behängt habe, nur flüchtige Blicke würfe, er müßte, wenn er überhaupt einiges Genie hätte, als ein anderer und Höherer von hier gehen.