Leopardi, Zibaldone, 6 nov. 1823, éd. Allia, (2003), trad. Schefer :
"Celui qui sait se nourrir de petits bonheurs, qui recueille dans son cœur les petits plaisirs qu’il a éprouvés durant la journée et qui sait donner du poids à ses petites aventures, traverse facilement l’existence, et s’il n’est pas heureux, il peut croire qu’il l’est sans s’apercevoir qu’il n’en est rien. Mais celui qui ne s’intéresse qu’aux grands bonheurs, qui compte pour rien ces petits événements agréables, ces petites victoires, satisfactions, réussites, etc., qui ne cherche pas à s’en nourrir, qui n’y revient plus et qui pense que tout n’est que néant s’il n’atteint pas le but important et difficile qu’il s’était proposé, celui-là vivra toujours dans l’affliction, dans l’anxiété, sans aucune jouissance et il ne trouvera jamais qu’un malheur perpétuel à la place de son grand bonheur. Et quand il l’atteindra, il le trouvera bien inférieur à ses espérances, comme cela arrive toujours avec ce que l’on désire et recherche ardemment."
Chi sa pascersi delle piccole felicità, raccogliere nell'animo suo i piccoli piaceri che ha provato nella giornata, dar peso presso se medesimo alle piccole fortune, facilmente passa la vita, e se non è felice, può crederlo, e non accorgersi del contrario. Ma chi non dà mente se non alle grandi felicità, non considera come guadagno, e non proccura di pascersi e ruminare seco stesso i piccoli accidenti piacevoli, le piccole riuscite, soddisfazioni, conseguimenti ec. e tiene rutto per nulla, se non ottiene quel grande e difficile scopo che si propone; vivrà sempre cruccioso, ansioso, senza godimenti, e in vece della gran felicità, ritroverà una con-tinua infelicità. Massimamente che, conseguito ancora quel grande scopo, lo troverà molto inferiore alla speranza, come sempre accade nelle cose lungamente desiderate e cercate.