Diderot sur Boucher (Salon de 1763) :
« Imaginez sur le fond un vase posé sur son piédestal et couronné d’un faisceau de branches renversées ; au dessous, un berger endormi sur les genoux de sa bergère ; répandez autour une houlette, un petit chapeau rempli de roses, un chien, des moutons, un bout de paysage et je ne sais combien d’autres objets entassés les uns sur les autres ; peignez le tout de la couleur la plus brillante, et vous aurez la Bergerie de Boucher.
Quel abus du talent ! combien de temps de perdu ! Avec la moitié moins de frais, on eût obtenu la moitié plus d’effet. Entre tant de détails, tous également soignés, l’œil ne sait où s’arrêter ; point d’air, point de repos. Cependant la bergère a bien la physionomie de son état ; et ce bout de paysage qui serre le vase est d’une délicatesse, d’une fraîcheur et d’un charme surprenants. Mais que signifient ce vase et son piédestal ? que signifient ces lourdes branches dont il est surmonté ? Quand on écrit, faut-il tout écrire ? quand on peint, faut-il tout peindre ? De grâce, laissez quelque chose à suppléer par mon imagination… »
Il s’agit vraisemblablement de ce tableau :
Si c’est bien le cas, Diderot inverse les deux personnages : il écrivait vite, après avoir vu des centaines de tableaux, à partir de notes griffonnées.